N° 8130 – Septembre 2019

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Lieux et symboles de la République

Marianne, le drapeau tricolore, “Liberté, Egalité, Fraternité”, La marseillaise, le 14-Juillet, le portrait du Président…sont autant de symboles de la République qui semblent figés. Ce serait oublier qu’ils ont été façonnés tout au long d’une histoire chaotique, souvent conflictuelle. Ainsi, certains des symboles apparaissent au coeur de la Révolution française, précédent l’avènement de la Première République, alors que les révolutionnaires ressentent le besoin de marquer le changement de régime par de nouvelles représentations visuelles. Ces représentations ne cessent de s’opposer à celles de la monarchie et de l’Empire jusqu’à ce que la République soit consolidée à la fin du XIXe siècle. Les symboles ont aussi été disputés au sein du camp républicain qui a vu s’affronter deux modèles de République, la libérale et la sociale. Ainsi a-t-on vu s’élever le drapeau rouge contre le drapeau tricolore, se dresser une Marianne combattante contre une Marianne plus “sage”, mère nourricière. Les multiples déclinaisons de ces symboles laissent entrevoir des positionnements politiques différents. La date de notre Fête nationale a été âprement discutée et le 14-Juillet a été finalement choisi en laissant la possibilité de l’associer à la prise de la Bastille (14 juillet 1789) ou à la Fête de la Fédération (14 juillet 1790).

La République n’est pas le régime le plus fréquent au XIXe siècle. Aussi, les symboles souvent subversifs ont été la cible des iconoclasmes.  Des arbres de la Liberté sont abattus, replantés, abattus de nouveau, des statues de Marianne sont remisées pour être remplacées par des bustes de l’Empereur ou du roi, avant d’être à nouveau érigées. Des institutions portent encore aujourd’hui les traces de l’affrontement entre les iconographies produites par ces régimes : ainsi des mairies arborent un Roi-Soleil ; à Paris des monuments monarchistes et bonapartistes cohabitent avec des monuments républicains comme le Panthéon, rendu à la République lors des funérailles de Victor Hugo ; l’Assemblée nationale et le Sénat conservent quant à eux un décor bien peu républicain .

Aux XIXe et XXe siècles, les symboles entrent peu à peu dans la vie quotidienne. Ils ornent les places, les écoles des villes et des villages et viennent s’immiscer jusque dans les intérieurs, sur la vaisselle, les timbres et les documents d’identité. Baptêmes et mariages républicains s’inventent, rivalisant avec l’Eglise, élaborant leurs propres rituels. Ces symboles ont été caricaturés, ce jusqu’à nos jours, alors qu’ils pouvaient sembler s’être affadis. Lors des manifestations des Gilets jaunes, graffitis, banderoles, affiches sont venus détourner nombre d’entre eux, renouant avec l’opposition entre deux visages de Marianne, et inventant une nouvelle devise : “Liberté, Egalité, Flashball”. Ce numéro de la Documentation photographique propose aux historiens, professeurs, élèves et citoyens de revisiter cette longue élaboration d’un patrimoine de symboles et de lieux qui ne cessent d’être travaillés.

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